Jean-Baptiste de Chappedelaine 1781-1840.

Nous avons brièvement abordé dans un précédent article, les origines de la famille Chappedelaine (voir Notes sur la famille de Chappedelaine). Les premiers membres de cette famille qui s'établirent en l'endroit de Illifaut (voir Quelques notes sur le passé de Illifaut) furent Jean-François de Chappedelaine et Louise de Miniac, dame de Bosnan (voir Quelques notes sur la famille de Miniac), les bisaïeuls de celui auquel est consacré cet article. « Jean Baptiste de Chappedelaine, fils légitime de René-Anne-César de Chappedelaine, seigneur de Boslan officier de la légion royale de la Cayenne et Anne Mathurine Le Charpentier du Margat, dame de Chappedelaine né ce jour a été ondoyé par le soussigné recteur avec la permission du vicaire du diocèse de Dol, ondoyé le vingt quatre novembre mil sept cent quatre vingt un... ». Cette famille disposait des terres nobles de Boslan anciennement donné sous la forme de Bosland, mais aussi la Vallée. Pourtant, Jean Baptiste de Chappedelaine n'aura pas eut le temps de se forger des souvenirs en l'endroit de Boslan où vivait sa famille, il devint orphelin de son père alors qu'il n'avait que deux ans, et fut recueillit par celui qui en était son parrain, le sieur Michel Picot de Limoëlan (voir Un gentleman-farmer breton au XVIIIe siècle : Michel-Alain de Limoëlan (1734-1793) par André Rayez), il aurait ainsi dit au tuteur de l'enfant : « vous n’êtes pas riche, j'ai sept enfants, il sera mon huitième ». Il rejoignit ainsi la fratrie Picot (voir la seigneurie de Limoëlan à Sévignac et ses possesseurs.). En 1798, Monsieur de Chappedelaine de Boslan, était officier de Cavalerie l'Armée de Condé et lors des secondes guerres de la chouannerie qui secouèrent la Bretagne durant la Révolution, il joignit les troupes rebelles, prenant ainsi modèle sur deux de ses frères adoptifs, le chevalier Joseph et le dénommé Nicolas. (voir Pierrot et Beaumont deux figures des troupes royalistes au moment de la Révolution.). Il jeta son dévolu sur Marie-Thérèse Picot de huit ans son aînée, et leur union se déroula à Sévignac le 29 brumaire an X, soit le 10 novembre 1801. Jean-Baptiste Marc Michel de Chappedelaine est dit propriétaire sur l'acte de mariage, et donné demeurant alors Saint Méen en Ille et Vilaine ; la jeune femme, Marie-Thérèse Picot de Limoëlan était née le 19 mars 1773 à Nantes. Parmi les témoins de l'union étaient présents, Anne Charpentier dame de Chapedelaine (sic) la mère du marié, propriétaire âgée de 52 ans, demeurant Illifaut ; Agathe Lépine, dame de Chapedelaine, propriétaire âgée de 40 ans, demeurant Saint-Méen (tante de l'époux) ; Michel Picot de Limoëlan, propriétaire agé de 34 ans, demeurant Nantes (frère aîné de l'épouse) ; et demoiselle Renée Picot de Limoëlan, propriétaire demeurant Limoëlan, âgée de 32 ans, demeurant Sévignac (jumelle du chevalier Joseph). C'est l'ancien procureur fiscal de l'ancienne seigneurie de Limoëlan qui reçut le consentement des mariés. Deux absents à cette cérémonie : Renée-Jeanne Roche de Fermoy veuve du sieur Picot de Limoëlan, la mère de la jeune femme, ainsi que le chevalier Joseph, qui était déclaré clandestin, mais dont on sait que un mois plus tard, il allait être impliqué dans l'attentat de la Machine Infernale (voir Lanrelas : le procès de Robinault de Saint Régent, page n° 2). 

Trois ans avant son union, une lettre en provenance de Londres datée du 21 Juillet 1798, était adressée au jeune comte de Chappedelaine, en voici le contenu « Monsieur et Cher Cousin. Ne sachant pas si vous êtes instruit de la mort de votre parent Chappedelaine qui était établi à la Nouvelle Angleterre, et ayant même des raisons de croire, vu l'éloignement où vous êtes que vous n'en avez pas été informé, je prends la liberté de vous le mander et en même temps de vous apprendre qu'il vous a fait son héritier. Quelqu'un m'ayant dit ici qu'il avait fait héritier un de ses parents du même nom et ne pouvant savoir au juste qui c'était j'ai fait venir une copie de son testament et quoiqu'il y ait bientôt quatre ans qu'il est décédé comme vous verrez par l'extrait que je vous envoie. Voici donc la traduction du testament qu'on m'a envoyé en anglais. Que tous les hommes sachent par ces présentes que moi Julien-Joseph-Hiacinthe de Chappedelaine lègue par mon dernier testament à Jean-Baptiste-Marc-Michel de Chappedelaine fils légitime René Anne Marie César de Chappedelaine toutes mes possessions dans les Etats-Unis d'Amérique consistant dans mon cinquième de l'isle de Sapello mon quart dans celle de Jackel, mon quart dans celle de Sainte Catherine, aussi mes cinq mille acres de terre dans la Compagnie de l'Ohio, mon moulin près Monistron dans l'état de New-Jersey, pour en jouir comme moy même sans pouvoir être troublé par mes parents dans cette jouissance. De plus je luy donne tout l'argent qui m'est du par la Société lequel sera employé en nègres comme aussi la dette que M. de Boisfeuillet me doit et en cas que le dit sieur Jean Baptiste Marc Michel de Chappedelaine vivant et résidant dans la paroisse de hillifou (sic) diocèse de Dol en Bretagne fut mort, je demande que mes ci-dessus mentionnées possessions iront à l'aîné de la branche de Chappedelaine d'Isle de Mayenne province du Mayne pour en jouir comme moi-même, déclarant leur laisser tout ce que la loi m'autorise à faire au sujet de toutes mes possessions réelles et personnelles.  En témoignage de quoi j'ay signé ces présentes en présence des soussignés et j'y ai apposé le sceau de mes armes, fait à l'isle de Sapello le 25 Octobre 1793 ». Signé Chappedelaine  Elisa B. hopkins et John Griffin témoins.  Embarqué à Saint Malo à bord du Richmond ce 16 novembre 1801 soit six jours après leur union, le couple Chappedelaine était accompagné de deux serviteurs : Victoire Aubin de Sévignac, 19 ans, femme de chambre ; et Pierre-Jacques Regnier de Paris, 35 ans, homme de confiance du citoyen Chappedelaine, en réalité sous cette fausse identité se cachait le chevalier Joseph Picot de Limoëlan qui échappait ainsi à la police de Fouchet suite à l'attentat commis. Le Richmond atteignit Norfolk le 3 juin 1802 mais il fallut aux occupants attendre quelques jours pour gagner Savannah. C'est là qu'ils apprirent que le vieil oncle dont ils venaient recueillir l'héritage, était mort lors d'un duel en septembre 1794. Mais les Picot de Boisfeuillet qui voulaient ainsi s'accaparer le bien du vieil oncle, furent victimes d'une épidémie et trépassèrent à leur tour. Le 30 aout 1802, Marie-Thérèse Picot épouse de Chappedelaine accouchait d'une petite Marie-Thérèse, en la cité de Savannah, mais la crainte d’être emporté par l'épidémie régnante, incita les jeunes parents à regagner la Bretagne, ils avaient appris par courrier que Renée, la jumelle de Joseph, était parvenue à lever le séquestre pour Limoëlan et autres terres. Ainsi le couple et l'enfant, ainsi que leur femme de chambre rentrèrent à Sévignac, laissant le soin à Joseph Picot de négocier la vente de l'héritage (voir Notes sur la famille Picot, page n° 4).  De retour au château de Limoëlan, Jean Baptiste de Chappedelaine et son épouse retrouvèrent les demoiselles Picot : Renée, Hélène et Amélie. Après la naissance de Marie Thérèse en 1802, suivirent les naissances de Hyacinthe en 1804, de Édouard en 1810, de Alphonse en 1810, de Léonie en 1812 et de Louis en 1815. Lors de la Restauration de Louis XVIII sur le trône de France, Mr de Chappedelaine fut promu Lieutenant Colonel de la Légion de Dinan, en tant que Volontaire Royaux pour l'année 1815.

Livre de solde pour 1845 Monsieur (Jean B(aptis)te Chappedelaine Lieutenant Colonel de la Légion de Dinan (Volontaire Royaux Le présent livre contenant quatre familles, celui ci

Comprise a été coté & paraphé par nous sous Inspecteur aux Revus employé à St Brieuc pour servir à enregistrer les sommes que M.M les payeurs Compteront à Mr de Chappedelaine Lieutenant Colonel de la Légion de Dinan (Volontaire Royaux) Pour l'année 1815 St Brieuc le 18 janvier 1815

Une signature Vignon Signature du porteur J.B de Chappedelaine

Payé sur extrait de réserve de M Vignon la somme de mille trente francs neuf centimes pour solde du 3 mai 1815 au 31 juillet suivant, cy 1030 fr St Brieuc le 22 janvier 1816

Ministère des Finances 3e division N° 5217 Copie D matrice générale Le directeur des Contributions directes du département des Côtes du Nord Monsieur le maire de la commune de Sévignac Monsieur le Maire J'ai l'honneur de vous adresser copie de la matrice général de votre commune rédigé pour les années 1829, 1830 et 1831 j'y joint un récepissé que je vous prie de me renvoyer exactement après l'avoir souscrit Je suis avec une considération distinguée Monsieur le Maire votre très humble et très obéissant serviteur Pour le directeur en congé l'inspecteur Une signature non identifiée

On sait qu'il fut désigné maire de Sévignac, charge qu'il occupait à partir de la mi octobre 1816, il conservait encore son écharpe comme en témoigne le courrier que lui adresse monsieur Sévoy, sous. préfet de Dinan en 1824.

Dinan, le 31 août 1824 Sous Préfecture de Dinan

Monsieur le Maire

« J'ai l'honneur de vous renvoyer après avoir légalisé votre signature l'extrait De registre des engagements volontaires de votre commune que vous m'avez adressé par votre lettre du 27 décembre J'ai l'honneur de vous offrir, Monsieur le Maire, l'assurance de ma considération très distinguée Le sous préfet Signé Sevoy ».

Le Collège royal de la Marine à Angoulême

Les fils du couple : Hyacinthe, Alphonse et Louis de Chappedelaine, s'orientèrent vers une carrière militaire, en revanche leur frère Édouard fut inscrit au collège royal de la Marine à Angoulême qui fut fondé le 31 janvier 1816, un établissement qui fut aussi connu sous le nom d'école préparatoire de la marine. Cet établissement fut supprimé en date du 1er avril 1831. Ci-dessous un courrier émanant de ce collège signé de Christophe de Chabrol de Crouzol 1771-1836, qui fut pair de France et ministre de la Marine sous Louis XVIII et Charles X, puis ministre des Finances de Charles X.

Le 19 oct 1824

« Ministère de la Marine et des colonies Personnel Officier militaire Monsieur, il m'a été rendu compte de l'examen subit par le sr Chappedelaine Edouard-Joseph (votre fils) pour être admis en qualité d'Elève de la Marine de 3e Classe au Collège d'Angoulême. Ce jeune homme ayant fait preuves des connsaissances exigées par le programme, je lui ai fait expédier la lettre de nomination ci jointe. Je vous ferai observer que l'époque fixée par l'ordonnance du Roi du 8e 7bre dernier pour l'ouverture des nouveaux cours d'études exigerait que les élèves fussent rendus au Collège le 10 9bre. Cepeandant par exception et pour cette année seulement, j'ai cru devoir fixer le 12 du même mois comme terme de vigueur. Tout élève qui ne se serait pas présenté le même jour ne pourrait plus être admis ; vous n'avez donc pas un instant à perdre pour faire conduire le jeune Chappedelaine à Angoulême L'Ordonnance du 22 janvier 1824 porte que les paren(t)s ou Répondan(t)s de chaque élève seront tenus de payer pour lui, par trimestre et d'avance ;a pension annuelle de 800 francs et le prix du trousseau qui est fixé à 600 francs, mais j'ai remarqué que vous avez négligé d'en produire l'engagement authentique à l'époque des examens. J'adresse à M. le gouverneur de l'école les diverses pièces que vous m'avez fournies ; mais je vous préviens que l'engagem(ent) Dont il s'agit est indispensable et que l'élève devra en être porteur au moment où il sera présenté au Gouverneur Je vous annonce avec plaisir sa nomination et j'espère qu'il se rendra digne de cette faveur par sa bonne conduite et son application Recevez Monsieur, l'assurance de ma parfaite considération. Le Pair de France, Ministre de La Marine et des colonies. »  Signé : Chabrol

Sépulture du comte et de la comtesse de Chappedelaine en la partie droite, les sœurs de madame de Chappedelaine reposaient en la partie gauche, comme précisé.

Jean Baptiste de Chappedelaine mourut le 13 avril 1840 à Limoëlan, agé de 59 ans. Il fut inhumé dans le cimetière saint Eloi autour de la vieille église de Sévignac. La sépulture de la famille fut transférée en l'actuel cimetière. Son épouse devait décéder moins d'un an plus tard.